Africa 2020 – N’Goné Fall : « Je veux faire tomber les clichés »

Ngoné FALL© Malick MBOW
Ngoné FALL© Malick MBOW

Africa 2020 – N’Goné Fall : « Je veux faire tomber les clichés »

 | 10 juillet 2019 à 11h22 | Par 

N’Goné Fall, la commissaire générale de la saison culturelle Africa 2020 Paris, en juin 2019.

La commissaire générale de la saison culturelle Africa 2020, qui se tiendra en France et dans ses départements et collectivités d’outre-mer, détaille sa méthode, ses exigences et ses objectifs. Avec un leitmotiv : ne jamais parler à la place d’un continent de plus de 1 milliard d’habitants.

Voulue par le président français Emmanuel Macron, la saison Africa 2020 se déroulera dans l’Hexagone et outre-mer, de juin à décembre 2020. À la tête de ce projet pluridisciplinaire, la commissaire d’exposition sénégalaise N’Goné Fall. Franche, directe et déterminée, elle fait le point, à l’heure où le premier comité de programmation se réunit.

Jeune Afrique : Pourquoi avez-vous accepté de prendre la tête de ce projet ?

N’Goné Fall : En raison de l’ampleur du défi. S’il faut changer le regard que les Français portent sur l’Afrique, il vaut mieux que ce soit des Africains qui s’en chargent. J’ai préféré prendre les commandes plutôt que de rester sur le bord de la route à pester pendant des mois. Quoi qu’il arrive, je pesterai contre moi-même, éventuellement contre d’autres. Mais veillons à ce que ce soit nous qui parlions de nous-mêmes. Qu’on cesse de parler à notre place !

Il s’agit de sortir de la Françafrique ?

Sortir de la Françafrique, oui, mais comment s’y prend-on ? On réfléchit ensemble, de part et d’autre, et on abat les clichés, de part et d’autre. On pose les armes, on laisse tomber la rancœur et on essaie de se projeter vers demain, ensemble. Il y a beaucoup de pédagogie à faire. Parfois, il faut même faire le ménage.

Après avoir accepté cette mission, vous vous êtes retirée à Saint-Louis, avec plusieurs personnes, pour réfléchir au sujet. La consultation, c’est votre méthode ?

Pour ce projet, oui. Ce n’est pas le mien, je l’incarne. Ce n’est pas mon idée, j’ai accepté de relever le défi. On parle d’un continent de plus de 1 milliard de personnes, et il aurait été très prétentieux de décider toute seule des orientations et des messages à faire passer au monde au nom du continent. J’ai donc invité quatre personnes à réfléchir avec moi. Elles m’ont demandé de garder le secret, mais je peux dire qu’il y a une Égyptienne, une Sud-Africaine, un Camerounais et un Nigérian qui ont entre 28 et 51 ans. Nés sur le continent, ils ont grandi sur le continent, ils travaillent sur le continent, mais ils sont dans des réseaux internationaux.

ILS REPRÉSENTENT PLUSIEURS GÉNÉRATIONS ISSUES DU MONDE DE LA CULTURE, DE LA COMMUNICATION, DES SCIENCES SOCIALES ET POLITIQUES

Cette vision à la fois panafricaine et internationale était importante. Ils représentent plusieurs générations issues du monde de la culture, de la communication, des sciences sociales et politiques. Je devais m’entourer d’acteurs pluridisciplinaires, pas seulement d’artistes ou de commissaires d’exposition, capables de transcender des idées et dotés d’un esprit extrêmement critique. J’avais besoin que l’on se dise les choses et que l’on aille au bout de la logique de cet exercice : à quoi sert cette saison ? Pourquoi faut-il la faire ? Comment cadrer les choses ?

Pourquoi à Saint-Louis du Sénégal ?

Je souhaitais mener cet exercice intellectuel, conceptuel, philosophique et symbolique aux portes du désert. Saint-Louis n’est pas une ville neutre : c’est une ville qui est française avant Nice, c’est l’île de mes ancêtres, puisque mes parents et grands-parents en sont originaires, c’est aussi un moyen de faire passer un message clair à l’Afrique du Nord en affirmant que le projet concerne tout le continent.

À quoi mesurez-vous votre réussite ?

Pour moi, l’objectif, c’est de faire tomber certains clichés sur le long terme. Au moins pour une partie de la population, car il ne faut pas rêver, ce n’est pas avec six mois de programmation qu’on va changer la perception de part et d’autre. Mais si déjà les gens se posent d’autres questions, adoptent d’autres comportements et d’autres manières de penser, de réfléchir, de travailler ensemble, ce sera en partie gagné.

D’où cette règle de la coconstruction des projets que j’ai imposée. C’est une série de graines qu’on plante, et on verra dans trois ans, dans cinq ans, ce qu’il en est. D’où cette exigence de projets structurants, au-delà de la diffusion et de l’événementiel pur.

LE DIRECTEUR D’UN CENTRE D’ART FRANÇAIS VA DEVOIR SE DEMANDER QUI, DE L’AUTRE CÔTÉ DE LA MÉDITERRANÉE, S’INTÉRESSE AUX MÊMES QUESTIONS QUE LUI, ET SE METTRE EN CONTACT AVEC LUI

Qu’entendez-vous par coconstruction ?

Le directeur d’un centre d’art français va devoir se demander qui, de l’autre côté de la Méditerranée, s’intéresse aux mêmes questions que lui, et se mettre en contact avec lui pour développer ensemble un projet ou une programmation. Il n’est pas question que les gens arrivent avec un projet ficelé en demandant le label. Ça, c’est directement « eject » !

Il y a des gens que j’ai dû appeler personnellement pour leur expliquer ce principe et leur donner une seconde chance. Soit vous suivez les règles, soit ce n’est même pas la peine d’y penser. Même pas en rêve ! On ne parle pas au nom de l’Afrique. Pareil du côté africain, il y a des collectifs d’artistes et des centres d’art indépendants qui sont arrivés avec un projet fini, et là, pareil, je leur ai dit : « Même pas en rêve ! »

RETOUCHEE - N'Gone Fall, commissaire générale de la Saison Africa 2020 en France

JE CHERCHE CEUX QUI ONT LE BON ÉTAT D’ESPRIT POUR SORTIR DE LA FRANÇAFRIQUE

Les projets seront-ils dupliqués ou exportés en Afrique ?

Pas forcément. Certains tandems ont décidé qu’il y avait des moments d’incubation sur le continent et/ou en France, mais l’idée, c’est vraiment de ne pas être dans l’événementiel. Je souhaite inviter les établissements culturels à repenser leur politique auprès de leurs publics et leur rapport aux artistes et à l’Afrique, les pousser à embarquer d’autres professions, que ce soit des sociologues, des philosophes, des économistes ou des écrivains.

Cela vient sans doute de mon ancienne vie d’architecte et des contacts qu’il faut avoir avec d’autres corps de métier. Certains, comme des écoles d’art et des universités, ont déjà signé des partenariats qui s’étendent bien au-delà de 2020.

Avez-vous obtenu l’assurance qu’il n’y aurait pas de dérogations ?

Il y a des règles. Je ne vois pas pourquoi il y aurait des dérogations. Jusqu’à présent, je n’ai subi aucune pression politique. Je fais le point régulièrement avec les conseillers diplomatiques, Afrique et culture, du président de la République, et il n’y a aucune pression, aucune demande de passe-droit, ce qui est assez agréable.

Avant d’accepter cette mission, mes conditions étaient très claires. Je ne suis de toute façon pas du genre à me plier aux pressions politiques, comme vous le savez. Après, les gens font ce qu’ils veulent. Moi, je cherche ceux qui ont le bon état d’esprit pour sortir de la Françafrique. Même si l’on n’est que dix, eh bien peut-être qu’on finira par créer un mouvement et que, au bout d’une ou deux générations, les choses auront changé. Saisissons cette occasion qui part d’une volonté a priori sincère.

Vous avez déclaré que « les Africains [devaient] se défaire des clichés et de l’amertume ». Pouvez-vous préciser votre pensée ?

Il n’est pour moi pas question que les gens se saisissent de la saison pour la transformer en plateforme où l’on règle ses comptes réels ou supposés avec la France. Je suis vigilante côté français par rapport à tous les délires et malentendus qui concernent le continent.

ON N’EST PAS LÀ POUR RÉGLER DES COMPTES COLONIAUX, DÉCOLONIAUX OU POSTCOLONIAUX

Mais, de la même manière, je suis vigilante côté africain. La majorité de ce continent n’a pas une histoire directe avec la France : je pense notamment aux anglophones et aux lusophones. La Françafrique, ils ne savent même pas ce que c’est ! Aujourd’hui, la France est un petit interlocuteur par rapport à l’offre culturelle à l’échelle du globe. On n’est pas là pour régler des comptes coloniaux, décoloniaux, postcoloniaux ou je ne sais quoi. À bon entendeur, salut !

Vous ne pourrez cependant pas éviter que l’histoire coloniale s’invite dans le débat ?

C’est pour cela qu’il y a un thème « Archivage d’histoires imaginaires ». Que les gens s’expriment ! Mais si s’exprimer cela veut dire taper sur l’autre, je ne vois pas l’intérêt.

Comment favorisez des liens plus ouverts au-delà de la sphère francophone ?

Quand les opérateurs français nous contactent, nous leur proposons d’entrée de jeu un interlocuteur anglophone ou lusophone. Tout le monde ne parle pas français sur ce continent. Il faut être interventionniste et force de proposition à ce niveau-là pour élargir les réseaux.

Vous avez choisi cinq grands thèmes comme « Économie et fabulation » ou « Oralité augmenté ». Ne sont-ils pas un peu fourre-tout ?

Si, parce que nous sommes très nombreux. Ce sont des titres plutôt poétiques, comme une invitation à l’imaginaire. C’était important que les gens ne pensent pas que cinq personnes du continent imposent leur regard sur le monde quand plus de 1 milliard de personnes sont concernées. Il fallait proposer des thèmes qui se recoupent. Ce n’est pas mon projet, je ne suis pas en train de faire une biennale à Venise ou à Dakar, je ne pouvais pas être dictateur !

Vous en aviez un peu envie ?

Non ! Mais ça n’empêche pas de faire la police quand les gens sortent du cadre !

La France n’est pas connue pour sa politique laxiste des visas… Ne craignez-vous pas des couacs à ce niveau-là ?

D’où le thème « Fiction et mouvements (non) autorisés » ! Au niveau de l’Élysée, on en a conscience, et des réunions sont prévues dès la rentrée avec la préfecture. Tout le monde est au courant et conscient de ce défi. Pour le moment, tous les professionnels africains qui sont venus en France n’ont eu aucun problème, quel que soit le pays d’où ils venaient.

Youssou N’dour, Asa, Emmanuel Macron, le gouverneur de Lagos Akinwunmi Ambode et Angelique Kidjo, lors de la visite du président français au Nigeria pour le lancement de la Saison des cultures africaines.

JE CHERCHE À PROVOQUER L’ALCHIMIE ENTRE LES PARTENAIRES, ET CE RÔLE DE MARIEUSE EST FONDAMENTAL

Combien y aura-t-il de projets ?

Nous y verrons plus clair à la fin de ce premier comité de programmation mi-juillet, quand on aura présélectionné 200 ou 300 propositions. Le comité se réunira de nouveau à l’automne. Je cherche à provoquer l’alchimie entre les partenaires, et ce rôle de marieuse est fondamental, surtout quand on demande à deux personnes qui ne se connaissent pas de travailler ensemble.

On s’appuie sur des experts sectoriels et il faut laisser son ego à la maison. J’ai enterré le mien en profondeur à Dakar, j’en attends de même de la part des personnes impliquées. Quand on établit des contacts, ce n’est pas pour que le tandem explose au bout d’un mois.

Cherchez-vous un équilibre des disciplines ?

Pour l’instant, on invite les gens à venir vers nous avec ce qu’ils sont et leurs envies. Il faudra ensuite veiller à ce qu’une discipline ne soit pas surreprésentée. Il faut faire le tri et s’assurer que tout le monde ne parte pas sur des projets de même nature. Il faudra aussi veiller, côté africain, à ce que l’on ne retrouve pas les mêmes artistes sur cinq projets. Si c’est pour avoir toujours les mêmes, ce n’est pas la peine.

Parlons d’argent. Combien en faut-il pour réaliser cette saison ?

C’est forcément un partenariat public-privé. La part des fonds publics est très claire, que ce soit en cash ou concernant la part que les opérateurs français apportent. La part variable, c’est le mécénat. L’État apporte 1,5 million d’euros, qui viennent des deux ministères de tutelle de l’Institut français. À cela s’ajoutent les contributions du ministère de la Culture par le biais des opérateurs, des collectivités territoriales, des régions, etc. Et puis il y a la part privée, les entreprises qui sont implantées en Afrique ou qui travaillent avec l’Afrique.

NOUS AVONS VOULU ÊTRE PRAGMATIQUES, AVEC UN COMITÉ EN FRANCE ET UN COMITÉ EN AFRIQUE

Pourquoi deux comités de mécènes ?

Ces gens-là sont très occupés et ne sont pas forcément sur des territoires géographiques où ils se croisent. Nous avons voulu être pragmatiques. Un comité en France et un comité en Afrique. À un moment donné, sans doute au premier trimestre 2020, il y aura forcément une jonction.

Le président français, Emmanuel Macron, avec des artistes de Nollywood, en juillet 2018, au New Afrika Shrine, à Lagos (Nigeria).

QUAND J’AI VU LE PRÉSIDENT, J’AI EU LA CONFIRMATION QUE NOUS ÉTIONS TOUS LES TROIS EN PHASE AVEC FRANCK PARIS

Vous avez discuté avec le président français Emmanuel Macron, puisque c’est son idée ?

J’ai eu une discussion avec Emmanuel Macron en juillet de l’année dernière.

Et ?

Je ne sais pas, il faudrait lui poser la question ! Mais j’ai mon franc-parler. Je suppose qu’il ne s’attendait sans doute pas à ça, mais je ne fais que spéculer. Il m’a remerciée d’avoir accepté et je l’ai remercié de nous avoir invités. Ensuite, on a échangé sur les enjeux, les défis, l’effort de pédagogie à faire. Il n’y avait pas besoin de plus. Une fois par mois, je fais le point avec Franck Paris, le conseiller diplomatique Afrique qui est venu me chercher et qui m’a convaincue. Quand j’ai vu le président, j’ai eu la confirmation que nous étions tous les trois en phase.

LE SOFT POWER, ÇA MARCHERAIT SI J’ÉTAIS EN TRAIN D’EXPORTER LE SAVOIR-FAIRE OU LA CULTURE FRANÇAISE

Vous n’avez pas peur d’être instrumentalisée pour les besoins du soft power français ?

C’est un risque quand on travaille avec le politique. La biennale de Dakar, je ne m’y retrouvais plus, je suis partie doucement en fermant la porte et en disant « bonne chance ». D’où ces innombrables conversations avec Franck Paris avant que je n’accepte. On parle de l’Afrique et du continent africain : cela n’a jamais été simple entre nous. Le soft power, ça marcherait si j’étais en train d’exporter le savoir-faire ou la culture française.

Je suis plutôt en train d’exporter le savoir-faire, la vision et l’innovation de tout un continent. D’ailleurs, trois projets ont pour le moment le même titre, choisi par des opérateurs français : « Learning from Africa ». C’est parlant. J’ai la naïveté de croire que c’est pour ma liberté de penser que le président m’a choisie. Si j’ai le moindre doute, même la veille de l’ouverture, je fermerai la porte. D’où l’intérêt de se voir tous les mois, pour être sûr qu’on parle de la même chose et qu’on n’est pas en train de s’entourlouper. Nous sommes dans un climat de confiance.

Quel type de médiation comptez-vous mener ?

Le but n’est pas de faire de la pédagogie sur les œuvres, mais sur les humains qui les conçoivent. Que les gens s’affranchissent du nom, du prénom, de la couleur de peau. Quel est le regard que l’on porte sur le monde, comment on transmet ses idées, ses visions, aux jeunes et aux moins jeunes ?

Vous voudriez parler d’un projet spécifique ?

Je cherche à mettre en place un focus sur des artistes femmes dans l’art contemporain. L’idée, c’est qu’une structure invite une ou deux commissaires d’exposition pour monter un projet en ce sens. Il faut être un peu proactif, mais cela semble marcher. À l’arrivée, on devrait avoir cinq ou six structures impliquées en ce sens. Cela permettrait de donner une chance à ce que j’appelle « la relève ». C’est aussi une façon de faire un clin d’œil à ma sœur d’armes, la commissaire nigériane Bisi Silva, décédée en février, car ce programme de mentorat qu’on avait pensé et monté ensemble nous tient à cœur.


Conseils avisés

Un comité consultatif composé de personnalités africaines et françaises a été réuni pour l’occasion. Présidé par le banquier Lionel Zinsou, il comprend le philosophe Souleymane Bachir Diagne, les journalistes Denise Epoté, Bintou Simporé, Claudy Siar, Soro solo, le musicien Ray Lema, l’écrivain académicien Erik Orsenna, l’historien Pascal Blanchard…

Mais aussi Najoua Arduini-Elatfani, directrice du développement du groupe GA, Gilles Leproust, de l’Association des maires de France, Jean-Philippe Lefèvre, de la Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture, Jean-Noël Tronc, de la Sacem, Sandrine Boucher, de l’AFD, et Audrey Baudeau, du Comité pour les relations nationales et internationales des associations de jeunesse et d’éducation populaire.


Les douze sages

Le comité de programmation d’Africa 2020 est composé de :

• Julia Grosse et Yvette Mutumba, du magazine Contemporary And, pour les arts visuels et l’écriture créative ;

• Mamadou Diouf, de l’université Columbia, pour la littérature et le débat d’idées ;

• Aristide Tarnagda, directeur des Récréâtrales, pour le théâtre ;

• Jay Pather, directeur du Live Art Festival de Cape Town, pour le théâtre anglophone, la performance et les arts de la rue ;

• Taoufiq Izeddiou, directeur du festival On marche, et le comité artistique des rencontres chorégraphiques d’Afrique et de l’océan Indien, pour la danse ;

• Alex Moussa Sawadogo, directeur de Ouaga Film Lab, pour le cinéma ;

• Mohamed Zoghlami, directeur général d’Axismed, pour l’animation, la BD et le jeu vidéo ;

• Aphrodice Mutangana, directeur général de KLab, pour l’entrepreneuriat ;

• Yvonne Mburu, chercheuse en immunologie à l’Institut Pierre-et-Marie-Curie, pour les sciences ;

• Neo Muyanga, musicologue, pour le jazz, les musiques traditionnelles, l’afrobeat… ;

• Amadou Fall Ba, coordinateur d’Africulturban, pour le hip-hop.

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