La tribune anonyme et édifiante qui provoque l’ire de Donald Trump

TRUMP 2017 © Malick MBOW
TRUMP 2017 © Malick MBOW

Paris Match | Publié le 06/09/2018 à 08h53 |Mis à jour le 06/09/2018 à 09h01

Kahina Sekkai

 

Donald Trump à la Maison-Blanche, le 27 août 2018.Kevin Lamarque / Reuters

Un membre de l’administration Trump a publié une tribune édifiante dans le «New York Times», décrivant l’organisation de la «résistance» pour limiter la gouvernance de Donald Trump.

Donald Trump a un mot : «TRAHISON?» Mercredi après-midi, le président américain a vivement réagi sur Twitter, quelques heures après la publication d’une tribune libre édifiante dans le «New York Times». L’auteur, un membre de l’administration Trump qui veut rester anonyme, y décrit comment une partie des employés de la Maison-Blanche s’organise pour «contrecarrer certains aspects de sa politique et ses pires tendances». Tout en assurant souhaiter le succès de la présidence Trump, l’auteur écrit : «Beaucoup des personnes nommées par Trump ont juré de faire ce que l’on pouvait pour sauver nos institutions démocratiques tout en déjouant les impulsions les plus malvenues de M. Trump tant qu’il est au pouvoir». Le problème : «L’amoralité du président», poursuit l’auteur qui se présente comme «membre de la résistance au sein de l’Administration Trump». «Quiconque travaille avec lui sait qu’il n’est pas attaché à quelconque principe qui guiderait ses décisions». Ses qualités de dirigeant? «Impétueux, accusatoire, mesquin et inefficace».

Ces propos vont dans le sens de la description de la Maison-Blanche par Bob Woodward. Le journaliste, qui avait révélé avec Carl Bernstein le scandale du Watergate, évoque dans son livre à paraître la façon dont certains tentent d’éviter les conséquences nocives de décisions impulsives, comme lorsque son ancien conseiller économique Gary Cohn a «volé une lettre qui se trouvait sur le bureau de Trump», avec laquelle il comptait acter le retrait américain d’un accord commercial avec la Corée du Sud.

« Les Américains doivent savoir qu’il y a des adultes en charge »

Comparé à «un enfant de CM2 ou de 6ème» par son ministre de la Défense Jim Mattis selon Bob Woodward, Donald Trump l’est aussi dans la tribune du «NYT» : «Ca peut être un piètre réconfort pendant une période chaotique, mais les Américains doivent savoir qu’il y a des adultes en charge. Nous sommes pleinement conscients de ce qui se passe. Et nous essayons de faire ce qu’il faut faire quand Donald Trump ne le fait pas.» Mais il ne faut pas y voir de «deep state», «l’Etat profond» que Donald Trump dénonce régulièrement comme source de ses ennuis judiciaires et de son manque de reconnaissance : «C’est le travail d’un Etat stable», assure au contraire l’auteur anonyme.

Ces écrits ont évidemment provoqué la colère du président américain, d’autant plus qu’ils sont publiés dans un quotidien qu’il déteste par-dessus tout. «Un jour, quand je ne serai plus président, avec de la chance d’ici six ans et demi, le « New York Times » et CNN et tous ces médias bidons feront faillite, les amis, car ils n’auront rien à écrire et rien ne sera intéressant, a-t-il assuré sur Fox News. Ils n’aiment pas Donald Trump et je ne les aime pas car ce sont des gens très malhonnêtes. Rappelez-vous, à propos du « New York Times » : quand j’ai gagné, ils ont été contraints de s’excuser auprès de leurs abonnés, ils ont écrit une lettre d’excuse, car ils n’avaient pas correctement couvert l’élection. Donc si le raté « New York Times » a un éditorial anonyme -vous y croyez, anonyme? Ca veut dire dégonflé, un éditorial dégonflé-, nous faisons un boulot super, nos chiffres dans les sondages sont géniaux, et devinez quoi? Personne ne pourra me battre en 2020 grâce à ce qu’on aura fait.» Il a partagé sur son compte Twitter cette interview dans laquelle il parle de lui à la troisième personne, rappelant sa haine envers le quotidien new-yorkais et ses ambitions pour sa réélection.

Quelques minutes plus tard, il a simplement demandé : «TRAHISON?», tant le principe qu’une «résistance» contrecarrant le président est choquant, puis «Est-ce que le soi-disant « haut placé de l’administration » existe vraiment ou est-ce encore une source bidon du raté New York Times? Si cette personne FAIBLARDE anonyme existe vraiment, le Times doit, pour des raisons de Sécurité Nationale, le ou la dénoncer au gouvernement immédiatement!»

Donald J. Trump

✔@realDonaldTrump

 

 

TREASON?

11:15 PM – Sep 5, 2018

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Donald J. Trump

✔@realDonaldTrump

 

 

Does the so-called “Senior Administration Official” really exist, or is it just the Failing New York Times with another phony source? If the GUTLESS anonymous person does indeed exist, the Times must, for National Security purposes, turn him/her over to government at once!

12:40 AM – Sep 6, 2018

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Chasse à l’auteur à la Maison-Blanche

Cette publication anonyme a mis tous les médias en émoi, certains cherchant à deviner à tout prix l’identité de son auteur. Certains internautes ont tenté d’analyser le vocabulaire utilisé et en sont parvenus à une conclusion tout à fait étonnante. «Lodestar», un mot figuratif pour «point de repère», n’a été retrouvé qu’à quatre occurrences sur le site de la Maison-Blanche… et à chaque fois dans un discours du vice-président Mike Pence. Certains y voient donc un signe pointant vers l’ancien gouverneur de l’Indiana.

Au sein de la Maison-Blanche, l’enquête est en cours pour démasquer l’auteur de la tribune, rapporte le «Washington Post». «Le problème pour le président est que ça pourrait être tellement de monde. Vous ne pouvez pas parvenir à une seule personne. Tout le monde tente, mais c’est impossible», a assuré une source au quotidien, qui rappelle à quel point Donald Trump est obnubilé par l’idée de gens de confiance dans son entourage, allant jusqu’à faire signer des contrats de confidentialité. «C’est comme dans les films d’horreur, quand tout le monde réalise que l’appel vient de l’intérieur de la maison», a résumé un ancien employé de l’administration.

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