«Punto final» pour Mariano Rajoy

Mariano RAJOY© Malick MBOW
Mariano RAJOY© Malick MBOW

Mariano Rajoy

Par Julien Prouvoyeur — 

Après avoir été renversé par le Parlement espagnol, la chute de Mariano Rajoy a été concrétisée par son annonce de quitter la tête du parti conservateur mardi.

L’histoire politique de Mariano Rajoy s’est achevée sur un dernier chapitre mouvementé. Celui qui était encore chef du gouvernement conservateur espagnol le 31 mai a annoncé mardi quitter la tête de son parti, le Parti populaire. «Le moment est arrivé de mettre un point final à cette étape. Le Parti populaire doit continuer à avancer et à construire son histoire au service des Espagnols sous la direction d’une autre personne», a déclaré Mariano Rajoy à l’issue d’une réunion des dirigeants du parti conservateur à Madrid. Alors que mercredi Pedro Sanchez a annoncé la composition de son nouveau gouvernement, Rajoy tire sa révérence avec 27% d’opinion favorable selon Metroscopia, l’institut de sondage espagnol. L’ancien Premier ministre conservateur laisse pourtant derrière lui une économie des plus dynamiques de l’Union européenne (depuis la crise de 2008) avec une croissance annuelle du produit intérieur brut de 2,8%.

Mariano Rajoy Brey

@marianorajoy

Doy las gracias a los militantes del @PPopular por su lealtad y a los españoles por su confianza y afecto. Ha sido un verdadero honor estar a vuestra disposición y servir a España.

Une carrière politique mouvementée

Les Espagnols s’étaient habitués à sa présence sur la scène politique. Depuis sa première élection dans sa Galice natale en 1981, Mariano Rajoy avait connu une rapide ascension. C’est en 1996 qu’il obtient son premier portefeuille comme ministre des Administrations publiques jusqu’à devenir président du Parti populaire en 2004. Pourtant, celui qui a voulu incarner «la force tranquille» a longuement été chahuté.

Depuis sa nomination à la tête du gouvernement en décembre 2011, Mariano Rajoy a su se montrer endurant face aux multiples crises. Attaqué par ses opposants, mal aimé par les Espagnols et jugé, en général peu charismatique, voire apathique, il a encaissé les coups sans faiblir. Arrivé au pouvoir au pire moment de la crise financière, avec un déficit public de plus de 9% du PIB et un taux de chômage de 26%, (le plus haut taux d’Europe), Rajoy n’a cessé de symboliser la rigueur et l’austérité. Son premier mandat fut aussi celui du début des scandales comme l’affaire Gürtel ou un système de blanchiment implique Luis Barcenas, l’ancien trésorier du parti populaire espagnol. A l’image du terrible coup de poing qu’il avait reçu lors d’une visite électorale en décembre 2015, la vie politique de Mariano Rajoy ressemble à un long match de boxe.

Sa politique de résilience a d’ailleurs suscité autant de critique que d’enthousiasme. Si certains ont estimé que Rajoy a eu la capacité de «laisser pourrir les situations afin d’éviter les conséquences fâcheuses», comme l’a affirmé la chroniqueuse espagnole Lucia Mendez, d’autres, à l’instar du politologue Anton Losada ont déclaré que son indolence n’est qu’un masque «alors que Rajoy, au contraire, sait parfaitement définir ses objectifs et joue au mieux ses cartes». Insensible ou insubmersible, il a néanmoins été violemment secoué par les revendications indépendantistes de la Catalogne, la pire crise qu’ait connue l’Espagne en quatre décennies de démocratie. Le bras de fer entre le gouvernement central et les séparatistes catalans a abouti à la tenue d’un référendum d’autodétermination le 1er octobre 2017. Là encore, Rajoy s’est montré impassible et aujourd’hui, les indépendantistes catalans ne menacent plus de faire sécession.

Le coup de grâce

Pendant trente-sept ans de carrière politique, et malgré les convulsions politiques liées aux crises et aux affaires, Rajoy a tenté de tenir bon. Même après un accident d’hélicoptère en décembre 2005, il s’en sort avec de simples contusions. A force de résistance, on le croyait indéboulonnable. Et pourtant. L’affaire Gürtel et les scandales de corruption qui ont touché le parti populaire, lui auront finalement été fatals. Après la motion de censure adoptée par le Congrès espagnol, alors même qu’il avait personnellement exclu toute démission, l’ancien chef du gouvernement a donc décidé de mettre fin à sa dernière fonction, chef du Parti populaire.

«Mon intention est d’abandonner définitivement la politique, il y a d’autres choses à faire dans la vie que de se dédier à la politique», a-t-il déclaré sur une radio privée. Malgré son départ, le parti populaire reste le parti majoritaire à la chambre des représentants et ses cadres ont la lourde tâche de lui trouver un remplaçant. «Personne en son sein n’a vraiment fait de plans pour tenter de succéder à Rajoy», a déclaré à l’Agence France presse le politologue Roger Senserrich. Au sein du parti, la bataille pour sa succession s’annonce féroce et Alberto Núñez Feijóo, actuel président de la Galice, se présente déjà comme son héritier…

Julien Prouvoyeur

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