Quand les banques de crédit s’opposent à la BCEAO 

Anonymous - © Malick MBOW
Anonymous – © Malick MBOW

La Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) procède régulièrement à la baisse de ses taux directeurs. Ce qui signifie le pourcentage auquel elle loue l’argent aux banques de crédit. C’est ainsi, qu’en juin 2012, elle annonçait la baisse de ses taux directeurs de 25 points de base fondée sur l’appréciation de la balance des risques et invitait ses huit Etats membres à des mesures de baisse des taux d’intérêt.

La BCEAO n’a ainsi jamais caché son désir de voir les banques de crédit répercuter ses efforts de baisse de ses taux directeurs sur les taux d’intérêt appliqués à la clientèle. Mieux, la BCEAO s’était même, en son temps, réunie avec les représentants des Associations professionnelles et établissements financiers de l’UEMOA (APBEF).

Elle demandait aux représentants des Associations professionnelles de demander aux établissements de crédit de revoir à la baisse leur marge d’intérêt. Les discussions n’avaient pu aboutir. Et le communiqué sorti par la BCEAO, à l’issue de cette rencontre avortée, indiquait que son gouverneur M. Tié- moko Meyliet Koné a appelé les banques de crédit à « renforcer les règles de transparence de l’accès de la clientèle à l’information et à appliquer un juste prix des services bancaires ».

Les APBEF se contentant tout juste de déclarer avoir « pris acte de la nécessité d’adapter rapidement leur stratégie de tarification des services bancaires aux mutations ayant affecté l’environnement interne et externe de leurs activités ». Les APBEF réclamaient la mise en place de dispositifs de maîtrise des profils d’emprunteurs, mais aussi la nécessité d’améliorer l’environnement des affaires, notamment en reconnaissance de leurs droits de créanciers, d’équité fiscale et de visibilité sur les orientations économiques d’ensemble. Déjà le 30 novembre 2012, elle s’était réunie avec les responsables des Apbef qui ont juste « pris acte de la nécessité d’adapter rapidement leur stratégie de tarification des services bancaires aux mutations ayant affecté l’environnement interne et externe de leurs activités ».

Les professionnels des banques et établissements financiers n’avaient pas caché leurs appréhensions en émettant des préoccupations. Ils demandaient la mise en place de dispositifs de maîtrise des profils d’emprunteurs, mais aussi la nécessité d’améliorer l’environnement des affaires, notamment en reconnaissance de leurs droits de créanciers, d’équité fiscale et de visibilité sur les orientations économiques d’ensemble. Malgré donc les efforts initiés par la BCEAO en baissant ses taux directeurs, les banques de crédit continuent à appliquer des taux d’intérêt élevés.

Un mépris qui pousse certains à s’interroger. C’est quoi les taux directeurs La baisse des taux directeurs adoptée par la BCEAO vise pourtant à permettre aux banques de se refinancer à des coûts plus allégés, ainsi qu’à donner l’opportunité aux particuliers, confrontés à des besoins de financement, d’accéder aux crédits à des taux d’intérêt plus souples. Une note de la Direction de la prévision des études économiques (DPEE) rapporte, qu’au quatrième trimestre 2013, les conditions appliquées par les établissements de crédit à la clientèle sont marquées par une progression du taux débiteur moyen estimé à 0,7 point. Ce qui amène le taux d’intérêt à 6,45%. Ce qui est contraire à la volonté de la BCEAO de rendre plus bas les coûts de crédits.

C’est avec l’éclatement de la crise financière en 2008 dans les pays de la zone euro que la baisse des taux directeurs, considérée comme solution à cette situation financière instable, a été au cœur des débats. Les taux directeurs sont des taux auxquels les banques centrales accordent des crédits à court terme aux banques commerciales. Ils sont constitués par le taux des opérations sur le guichet de prêt marginal et par le taux de soumission aux opérations d’open market. Le taux de refinancement est le principal taux directeur utilisé par ces institutions d’émission. Une banque commerciale, qui obtient du crédit avec un taux de refinancement moins cher, pourra, de ce fait, octroyer des financements aux particuliers mais aussi aux particuliers mais aussi aux entreprises à des coûts moins chers.

Services bancaires : Les mesures de la BCEAO sur la gratuité en vigueur depuis 2014

Voici, un communiqué de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) listant les services bancaires à offrir à titre gratuit par les établissements de crédit de l’UEMOA. Une directive que les banques sénégalaises ont vite fait de « déchirer » dans le but tout simplement d’imposer leur diktat aux clients, sous l’œil complice de l’Etat qui observe sans rien faire

Dans le cadre des actions visant à renforcer l’inclusion financière des populations, l’accélération de la bancarisation et le financement bancaire des Etats membres de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), des concertations ont été engagées entre la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) et la profession bancaire, représentée par la Fédé- ration des Associations Professionnelles des Banques et Etablissements Financiers (FAP- BEF) de l’UEMOA.

L’objectif visé est de parvenir à une réduction et à une rationalisation graduelle des conditions de banque appliquées à la clientèle, dans le strict respect du principe de libéralisation desdites conditions en vigueur dans l’Union. Ainsi, au titre de la première phase de ce processus, il est porté à la connaissance du public que les services bancaires énumérés, ci-après, seront offerts à titre gratuit par l’ensemble des établissements de crédit exerçant leurs activités dans les pays membres de l’UEMOA, à compter du 1er octobre 2014.

 Liste des services bancaires à offrir à titre gratuit par les établissements de crédit de l’UEMOA

  1. Ouverture, fonctionnement et suivi de compte – Ouverture de compte ; – Délivrance de livret d’épargne ; – Tenue de compte sur livret d’épargne ; – Transmission de relevé de compte (une fois par mois) ; – Relevé récapitulatif des frais annuels ; – Dépôt d’espèces dans la banque du client quel que soit le guichet (hors acquittement de frais de timbre fiscal) ; – Retrait d’espèces dans la banque du client quel que soit le guichet, à l’exception des opérations par chèques de guichet ; – Domiciliation de salaire ; – Changement d’éléments constitutifs du dossier du client, notamment d’identification ; – Mise en place d’une autorisation de prélèvement (ordre de prélèvement à partir du compte) ou de virement permanent (création du dossier) ; – Clôture de compte.

 

  1. Moyens et opérations de paiement – Retrait auprès d’un guichet automatique (GAB/DAB) de la banque du client ; – Paiement par carte bancaire au sein de l’UMOA ; – Consultation de solde et édition du relevé de solde au GAB/DAB dans la banque du client ; – Virement de compte à compte dans la même banque ; – Encaissement de chèques tirés sur une banque de l’Union ; – Encaissement de virements nationaux, communautaires et internationaux.

3- Banque à distance -Avis de débit et de crédit par voie électronique ; – Consultation et édition du solde et de l’historique du compte à travers le GAB/DAB de la banque du client.

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Un taux d’intérêt plus bas entraîne l’investissement

Le 5 mars 2014, le Comité de politique monétaire de la Banque centrales des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), qui se réunissait, notait la poursuite de la détente des taux d’intérêt sur les différents compartiments du marché monétaire

Ce qui se traduisait par le taux moyen pondéré des appels d’offres d’injection de liquidités à une semaine et celui des transactions sur le compartiment à une semaine du marché interbancaire qui a connu des baisses respectives de 21,5 et de 17,0 points de base entre le troisième et le quatrième trimestre 2013. Sur le marché des titres publics, les émissions de bons par les Trésors ont été réalisées au taux moyen pondéré de 5,14 % au quatrième trimestre 2013, après un niveau de 4,59 % au trimestre précédent.

En se basant sur ces analyses, le Comité de politique monétaire a décidé de maintenir inchangés les taux directeurs à leurs niveaux en vigueur depuis le 16 septembre 2013, reprenait le quotidien national Le Soleil qui se fondait sur un bulletin de la DPEE. « En se basant sur ces analyses, le Comité de politique monétaire a décidé de maintenir inchangés les taux directeurs à leurs niveaux en vigueur depuis le 16 septembre 2013.

En termes plus clairs, le taux d’intérêt minimum de soumission aux opérations d’appels d’offres d’injection de liquidités et le taux d’intérêt du guichet de prêt marginal restent respectivement à 2,50 % et 3,50 % », écrit le quotidien national. La DPEE constatait en même temps dans sa publication que, « malgré l’assouplissement de ces conditions de refinancement opéré par la Bceao, qui avait baissé de 25 points de base de ses taux directeurs, le taux débiteur reste élevé. »

Dès lors, aux yeux des spécialistes de la finance, « une baisse des taux directeurs doit, par conséquent, entraîner une diminution des taux d’intérêt des banques commerciales ». Pourtant, il est généralement admis, qu’en situation de taux d’intérêt plus bas, on relance facilement l’économie puisque les opérateurs économiques auront la capacité d’investir dans le pays.

Les associations de consommateurs et usagers sont mécontentes des services rendus par les banques. Elles ne manquent de le manifester à chaque fois que l’occasion leur est donnée. Dans les colonnes du quotidien Enquête du jeudi 12 février 2015, Momar Ndao, le Président de l’Association des consommateurs du Sénégal (ASCOSEN), dénonçait les abus des banques.

Parmi ceux-ci, le « conditionnement » qui n’est pas clairement donné aux consommateurs dans les publicités et l’application par les banques de l’entrave à la mobilité bancaire alors que « le droit au choix de la banque est garanti ». Le Président de l’Association des consommateurs et sociétaires des institutions financières (ACSIF) lui aussi, s’en prend aux banques.

Constatant d’emblée « le non-respect et le manque de considération vis-à-vis des clients », Famara Cissé de dire lister dans les colonnes du quotidien Enquête : « Les longues files d’attente dans les agences où un guichet sur 3 fonctionne, le non-respect des mesures de gratuité édictées par la Banque centrale, la lenteur dans les octrois de prêts avec un réel problème de désinformation autour des taux d’intérêts et la prime d’assurance aux emprunteurs qui n’est jamais rétrocédée ». M. Cissé déplorait également l’insécurité dans les Guichets automatiques à banque (GAB) qui ne disposent pas de caméra de surveillance.

Même son de cloche chez le Secrétaire général de l’Association des usagers de l’eau, de l’électricité, des télécommunications et des services (ADEETELS) qui est d’avis que les banques « n’ont pas une très bonne presse auprès des populations malgré leur nécessité et leur indispensabilité dans la société ». Il dénonçait également le manque de transparence à travers le système bancaire. Me Massokhna Kane, le Président de SOS Consommateurs enfonçait le clou. Selon lui, « la banque est un problème au Sénégal, un vrai problème pour les consommateurs ».

A ses yeux, « les clients ont l’impression d’être traités comme des usagers et non comme des clients ». C’est pourquoi il invite les banques à faire en sorte que cette perception que les usagers ont, change.

Au cours d’une manifestation de protestation organisée par l’ACSIF en août 2015, son Président Famara Cissé s’indignait : « Nous sommes là pour alerter et interpeller l’opinion publique sur une injustice. Les clients sont victimes du vol et de l’arnaque organisés à grande échelle par les institutions bancaires. Les clients sont pris en otage ». Non sans accuser les banques d’organiser elles-mêmes, « la paralysie de la mobilité bancaire ».

Une pratique qui durcit les conditions de départ des clients désireux de changer de banque. « Désormais, tout client désireux de quitter une banque doit s’acquitter du paiement de la faramineuse somme de 177 500 francs CFA ».

Les clients des banques s’indignent également de la façon dont celles-ci poussent leurs usagers à s’endetter. Selon les périodes (rentrées scolaires, fêtes de fin d’année, fêtes religieuses), elles proposent aux clients des prêts. Des prêts dont les taux de remboursement varient entre 6 et 7%. Seulement, une fois le prêt contracté, d’autres taxes et frais supplémentaire viennent s’y greffer. Et le client est obligé de payer beaucoup plus qu’il n’a emprunté. Tout un stratagème utilisé pour ruiner le client.

Source Kritik Hebdo 

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