Gina Haspel, une espionne accusée de torture propulsée à la tête de la CIA

Hubert de Givenchy © Malick MBOW
Hubert de Givenchy © Malick MBOW

13/03/2018

 

Gina Haspel est la première femme à prendre la tête de la CIA. – CIA – AFP

 

A 61 ans, Gina Haspel vient d’être nommée à la tête de la fameuse agence de renseignement américaine. Une première pour une femme. Mais le passé trouble de cette espionne, et sa possible implication dans la mise en place de pratiques de torture dans des prisons secrètes, viennent ternir cette promotion.

Elle est la première femme nommée à la tête de la CIA. Gina Haspel a été propulsée à la tête de l’agence de renseignement américaine, ce mardi, après le limogeage par Donald Trump de son secrétaire d’Etat Rex Tillerson, remplacé dans la foulée par l’actuel numéro un de la CIA, Mike Pompeo. Une nomination historique.

Mais le rôle de cette ancienne responsable des opérations clandestines dans les prisons secrètes où des détenus étaient torturés, pourrait compliquer sa tâche pour diriger l’une des plus grandes agences de renseignement du monde.

Trente ans d’expérience à la CIA

Agée de 61 ans, Gina Haspel est une espionne très expérimentée dans les opérations clandestines. Elle a rejoint la CIA en 1985 et a servi dans plusieurs endroits du monde, notamment à Londres à la fin des années 2000.

« Gina est une espionne exemplaire et une patriote dévouée qui apporte plus de 30 ans d’expérience dans l’agence. Elle est aussi une dirigeante expérimentée avec une aptitude fantastique à faire les choses et inspirer ceux qui l’entourent », déclarait Mike Pompeo en la nommant numéro 2 de l’agence, il y a un an.

Trois anciens directeurs de la CIA et d’autres responsables, dont James Clapper, ancien directeur du renseignement américain, avaient apporté leur soutien à Gina Haspel.

Accusée de torture

En revanche, deux sénateurs démocrates ont fait part de leurs réserves sur sa nomination dans une lettre au président Donald Trump. « Son parcours fait qu’elle n’est pas adaptée pour ce poste », estiment les sénateurs Ron Wyden et Martin Heinrich.

Gina Haspel avait été nommée en 2013 à la tête du Service national clandestin de la CIA, mais avait été remplacée après seulement quelques semaines, apparemment en raison de doutes sur sa responsabilité dans la mise en place après le 11 septembre 2001 de prisons secrètes à l’étranger, où des méthodes comme la simulation de noyade, assimilée à de la torture, étaient employées pour interroger les suspects.

Destruction de vidéo compromettantes

Selon le Washington Post à l’époque, elle avait « géré une prison secrète en Thaïlande où les détenus étaient soumis à des simulations de noyade et à d’autres mauvais traitements ». Le quotidien américain affirmait que Gina Haspel avait aussi été impliquée dans la destruction en 2005 de vidéos compromettantes sur ces techniques « d’interrogatoire poussé » appliquées sur plusieurs détenus en Thaïlande.

Les avocats de ces détenus membres présumés d’Al-Qaïda souhaitent récupérer ces vidéos pour les présenter devant les tribunaux. Parmi les prisonniers soumis à des méthodes d’interrogation brutales sous la responsabilité de Gina Haspel figurent deux Saoudiens: Abd al-Rahim al-Nashiri, considéré comme le cerveau de l’attentat contre le pétrolier Limburg en 2002 et de l’attaque contre le navire américain USS Cole en 2000,  et Abou Zoubaydah, le premier membre influent présumé du réseau islamiste capturé par les Américains après le 11-Septembre.

Des preuves bientôt détruites?

Un rapport secret sur ce programme de tortures de la CIA a été réalisé en 2014 par la commission du Renseignement du Sénat, mais le président actuel de cette commission, un Républicain, tente depuis plusieurs mois d’en rassembler les copies, assurant vouloir éviter des fuites.

Les démocrates craignent que l’élu républicain ne veuille détruire toutes les copies de ce rapport et que la vérité sur ce programme de la CIA ne voie jamais le jour.

Ce rapport de 6700 pages détaille les méthodes d’interrogatoire et les conditions de détention controversées des suspects, en utilisant des techniques interdites comme la simulation de noyade ou la privation de sommeil pour obtenir des aveux. Un résumé de 528 pages avait rendu public en décembre 2014 mais la version complète – classifiée – comprend des détails sur les méthodes, les participants et les lieux.

Le président sortant Barack Obama, qui craignait que ce rapport soit enterré, a conservé une copie pour sa librairie présidentielle de Chicago. Mais elle restera classifiée jusqu’en 2029.

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