Habib Faye, un génie de la basse

Abib FAYE© Malick MBOW
Abib FAYE© Malick MBOW
  • Le 25 mai, 2018

Habib Faye, un génie de la basse

Habib Faye est mort il y a un mois pile. Génie de la basse, ami et partenaire de Youssou Ndour au Super Étoile, il avait 53 ans.

Habib Faye était un garçon discret. Sur scène, il était rangé au fond, près des rideaux. Entre lui et le public, Youssou Ndour au micro. Parfois avec Jimmy Mbaye, ils s’avançaient au premier rang pour esquisser des pas de danse avant de regagner leur coin en synchro. Ce geste, ils l’ont répété dans presque toutes les grandes scènes mondiales. Pendant près de 30 ans.

Son rôle pourrait paraître simple, voire insignifiant. Mais au Super Etoile, Habib Faye était le « Big boss ». Il n’était pas seulement bassiste. Il était aussi arrangeur, concepteur, claviériste et compositeur. Sans lui, le Super Étoile perd son âme. « Rien ne sera plus comme avant », a pleuré Youssou Ndour.

Habib Faye est mort mercredi 25 avril. Emporté par une infection pulmonaire. Sa maladie n’était pas connue. « Il continuait à mener ses projets tout en souffrant en silence », témoigne, admiratif, Vieux Mac Faye, son frère et mentor.

Habib venait d’entamer une tournée et préparait un album. « Il avait encore tellement de choses à dire d’un point de vue culturel et musical, regrette son frère. Il s’attachait à faire valoir une nouvelle forme de jazz ethnique. »

Ce projet l’a amené à courir le Sénégal pour classer les rythmiques propres à chaque ethnie et les mêler au jazz.

Précoce
Habib Faye était sans âge. Ses 53 ans, il les portait comme il trimballait sa guitare basse. Avec énergie et panache. On lui donnerait 10 ans de moins, avec ses airs de gros nounours.

Il est issu d’une tribu de musiciens. Ses parents ont grandi en dansant de la salsa et du rock’n’roll ; ses frères, Lamine, Adama et Vieux Mac, en jouant de la guitare. Ses premiers accords, c’est grâce à ce dernier. À 9 ans déjà, il improvise et s’initie au jazz. Pour être dans l’air du temps, il apprend par cœur le répertoire des deux grands groupes de l’époque : le Super Diamono et le Super Etoile.

Avec Michael Soumah, animateur à Radio Sénégal, il monte sa propre formation « Watosita ». Et joue, occasionnellement, pour un groupe de variétés de l’époque : « Thiaf ». Très vite, Habib commence à se faire un nom. Les « grands » le remarquent. Son premier succès arrive avec les Touré Kunda.

À 15 jours du bac…
En concert à Dakar au Stade Demba Diop, le groupe mythique a besoin d’un bassiste. Habib qui était venu au concert en simple spectateur, saisit la balle au bond. Il passe le test avec brio. Il commence à bâtir sa réputation. Le tout-Dakar ne parle que de ce jeune bassiste aux airs de Jimi Hendrix. Il rejoint le Super Diamono en remplacement de son frère Lamine.

À 15 ans, il est coopté dans le Super Etoile 2, une sorte d’équipe B, qui suppléait l’équipe type lorsque celle-ci était en tournée internationale avec Youssou Ndour.

1984, Habib Faye rejoint les titulaires du Super Etoile aux côtés de son frère, Adama Faye, claviériste et guitariste. Il participe avec lui à l’arrangement des morceaux du groupe. Lorsqu’Adama quitte le groupe, You lui confie la boîte à musique.

À 15 jours du bac, Habib claque tout. Et suit son étoile. Pour une tournée européenne. La légende s’écrit.

Avec le Super Etoile, il fait le tour du monde et des grandes scènes. En 1988, il participe à la tournée « Human Rights Now » d’Amnesty international. Habib confessera que ce fut pour sa carrière de musicien, l’expérience « la plus enrichissante ». Et pour cause. Habib Faye côtoie de grosses pointures : Peter Gabriel, Sting, Tracy Chapman, Bruce Springteen…

Cerise sur le gâteau, avec Peter Gabriel, il enregistre l’album The Lion, qui vaut à Youssou Ndour un disque d’or. Conquis, l’auteur-compositeur-interprète britannique l’enrôle sur d’autres projets.

Der
En 1996, Mickey Hart l’engage pour l’album Mystery. Il ajuste sa technique aux côtés des plus grands : Manu Katche, Mokhtar Samba, Joe Zaminul, Paco Sery, Gilberto Gil, Chet Atkins, Mark Knopfler, Brandford Maesalis, Poogie Bell, David Sancious, Lionel Loueke, Tania St Val, Jacob Devarieux, David Sanbord, Carlinhos Brown, etc. Tous se l’arrachent. Au Sénégal, il signe les albums de Viviane, Abdou Guité, Kiné Lam.

Entre temps, le bassiste monte son propre groupe de jazz, « Habib Faye Quartet », avec des musiciens européens (Lionel Fortin au piano, Carlos Bagidi aux drums) et sénégalais (Laye Lô à la batterie, Kevin, Ass Malick et Ibou Cissé au clavier). Les membres défilent selon la disponibilité des uns et des autres. Une formation indéfinissable, à l’image des Weather Reports et du bassiste Jaco Pastorious, dont Habib est fan et disciple.

2012, le clash. Youssou Ndour, qui est nommé ministre dans le gouvernement de Macky Sal, décide de mettre en veilleuse sa carrière musicale. Il confie la direction du Super Etoile au percussionniste Mbaye Dièye Faye. Habib Faye et Jimmy Mbaye décident de poursuivre leur carrière solo. Cinq ans passèrent, le temps fit son œuvre. Jimmy retrouve le Super Étoile. Habib Faye aussi, le temps d’honorer Bercy 2017. La der pour le bassiste.

L’histoire s’arrête, mais la légende continue.

 

Auteur: Seneweb news

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